SUR LA COMMUNICATION AU PÉTITIONNAIRE DES AVIS DES MINISTRES INTÉRESSÉS AVANT LA RÉUNION DE LA CNAC
Author : Brice Crottet
Published on :
24/10/2018
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Par un arrêt du 15 octobre 2018 (req. n°17MA00290), la Cour administrative d’appel de Marseille vient d’apporter, bien que de manière très discrète, une précision importante sur la possibilité de communiquer les avis des ministres intéressés, préalablement à la réunion de la Commission nationale d’aménagement commercial (CNAC).
Pour rappel, l’article R. 752-36 du code de commerce prévoit que les ministres en charge du commerce et de l’urbanisme donnent leurs avis sur le projet, lesquels sont communiqués ensuite aux membres de la Commission, lors de sa réunion, par le commissaire du Gouvernement.
Il convient toutefois de souligner que la Commission demeure une autorité administrative dont la procédure n’est pas régie par le principe du contradictoire (CE, SSR 4/5, 4 octobre 2010, syndicat commercial et artisanal de l’agglomération sénonaise et autre, req. n° 333413).
Il résulte à ce titre d’une jurisprudence constante « qu’aucune disposition ni aucun principe n’impose à la commission nationale, qui n’est pas une juridiction, de communiquer à la société auteur du recours les observations produites par la société pétitionnaire devant elle et de ne pas entendre séparément les parties qu’elle convoque » (CE, 23 décembre 2010, SAS Distribution Casino France, req. n°335990 ; voir également, CE, 8 décembre 2010, SAS Angedi, req. n°335145) ;
Et il résulte de ce principe que les avis des ministres n’ont pas, non plus, à être communiqués aux requérants préalablement à la réunion de la CNAC et que, en tout état de cause, leur non-transmission n’affecte pas la légalité de cette décision (s’agissant de tiers requérants, CE, 28 décembre 2012, SAS Jaly, req. n°356355 ; s’agissant de pétitionnaires requérants, CAA Nancy 2 avril 2015, SAS Supermarchés Match, req. n° 14NC00741).
La Cour administrative d’appel de Marseille semble à ce titre, se situer dans le prolongement de cette jurisprudence, en estimant qu’ « Aucune disposition législative ou réglementaire, et notamment pas l’article L. 311-2 du code des relations entre le public et l’administration, n’impose à la Commission nationale d’aménagement commercial de communiquer d’office au pétitionnaire les avis des ministres chargés de l’urbanisme ou du commerce, préalablement à sa décision ».
Toutefois, les termes de l’arrêt laissent entrevoir une nuance importante. Une lecture a contrario du considérant reproduit ci-dessus souligne en effet une différence importante entre le pétitionnaire d’un côté et les tiers de l’autre.
Cet arrêt indique implicitement que, contrairement à la pratique actuelle, le pétitionnaire pourrait demander, préalablement à la réunion de la CNAC, la communication des avis des ministres. Tout refus de la CNAC pouvant être de nature à rendre sa décision irrégulière.
Cette interprétation trouve soutien dans le deuxième alinéa de l’article L. 311-2 du code des relations entre le public et l’administration, que vise la Cour et qui précise que : « Cependant, les avis, prévus par les textes législatifs ou réglementaires, au vu desquels est prise une décision rendue sur une demande tendant à bénéficier d’une décision individuelle créatrice de droits, sont communicables à l’auteur de cette demande dès leur envoi à l’autorité compétente pour statuer sur la demande. Lorsque les motifs de l’avis n’y figurent pas, ceux-ci doivent être également communiqués au demandeur en cas d’avis défavorable. »
Cet arrêt laisse certes en suspens une série de questions :
– Ce droit à communication devrait-il être reconnu au pétitionnaire qu’il soit à l’origine du recours contre la décision ou l’avis de la CDAC ou qu’il défende simplement son projet à la suite du recours d’un tiers ?
– Ce droit à communication pourrait-il être effectivement exercé, alors que les avis des ministres ne sont formellement transmis aux membres de la CNAC, par le Commissaire du gouvernement, que lors de leur réunion ?
Cet arrêt pourrait malgré tout inciter les pétitionnaires à demander systématiquement communication des avis des ministres auprès de la CNAC préalablement à sa réunion. Cette pratique aurait en effet pour avantage de fournir aux pétitionnaires de nouvelles indications lui permettant de défendre clairement son projet devant la Commission.
Malgré ces doutes et ces hésitations quant à la portée de l’arrêt, ce dernier présente dès lors le mérite de questionner, encore un peu plus, le manque de transparence dont semble souffrir la procédure suivie devant la CNAC.
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